lundi 7 janvier 2019

Nos vœux de nouvel an inspirés par l’Epiphanie

Cette grande fête nous donne une belle occasion de prendre conscience de l’une des nombreuses plaies de l’humanité qui a deux facettes: l’esprit grégaire et la servilité. En effet, les fameux rois-mages nous en ont laissé un magnifique contre-exemple. 
     
Au beau milieu d’un monde encore majoritairement païen, même si le paganisme était alors fortement sur le déclin, ils ont su s’en démarquer et s’en détacher non sans courage. Car l’esprit grégaire ou, si l’on préfère, « moutons-de-Panurge » est tyrannique. Et d’autant plus qu’il est majoritaire ; et pas une preuve d’intelligence mais plutôt de la crainte qu’on appelle respect humain ou de l’esclavage qu’est le conformisme. Quoi de plus dégradant pour l’homme que de n’avoir pour ligne de conduite que celle du caméléon ! Quoi aussi de plus bête, comme le montre bien la fin de l’histoire de Panurge, que la préoccupation dominante et malheureusement si commune d’être à la mode, à la page, au goût du jour, dans le vent, de son temps, « up to date » ou simplement comme tout le monde! Quoi enfin de plus dangereux car dispose à tous les reniements et trahisons de causes communes! Et, faut il le préciser, pas pour des causes plus nobles mais, bien au contraire, allant de paire avec la bassesse de ce comportement. Toutes les révolutions parvenues à leur fin ont su judicieusement, il faut le reconnaître, exploiter cette grande faiblesse humaine. Dans le domaine religieux il en fut notamment ainsi depuis l’ancien arianisme jusqu’au modernisme aujourd’hui triomphant, répandus dans l’Eglise entière, en passant par le protestantisme où sombrèrent des pays entiers. Si l’ensemble de l’Eglise n’échappe pas à ce grand travers, c’est dire qu’il existe a fortiori pour toute autre société comme pour toute partie de l’Eglise. C’est dire aussi qu’il peut parfois exister sous apparence de bien ou pour la soi disant défense des biens les plus grands mais par des moyens très contestables…


A l’égard d’Hérode comme envers leurs pairs, en Orient, ces Rois ne firent également pas preuve de la servilité appelée ordinairement obéissance mais, en réalité, fausse obéissance. En effet, toute vertu est une aptitude à un bien particulier qui ne peut militer contre une autre vertu donc un autre bien particulier comme la justice, la foi etc.. Et l’obéissance véritable à quelque autorité humaine que ce soit ne peut aller contre la volonté divine et absolument souveraine, comme le leur a fait comprendre l’inspiration céleste leur indiquant de ne pas repasser par Jérusalem donc de désobéir à l’injonction criminelle de son tyran. La servilité elle même est également tyrannique et pour les mêmes raisons que l’esprit grégaire, son parent, sauf, comme on peut aisément le constater, qu’elle grandit dans son étendue et son degré proportionnellement à la proximité du pouvoir ou à l’espoir de s’en rapprocher qu’on appelle l’ambition. Autrement dit, c’est bien plus le grand défaut de l’élite d’une société que de sa base. Elle procède des trois fameuses concupiscences universelles (argent, pouvoir et plaisirs) et est le moyen le plus facile, étant le plus vil, de les satisfaire à défaut de mériter. Elle s’apparente encore à l’esprit grégaire par la crainte qui lui est propre, elle-même servile, celle de déplaire au pouvoir, qui n’est autre que la crainte de perdre ses propres pouvoir, réputation, fortune et jouissances terrestres. Là aussi tous les grands tyrans ou su habilement exploiter cette autre bassesse humaine, pour asseoir leur domination, en distribuant ces biens ou en menaçant d’en priver.


Les Mages ne furent donc ni grégaires, ni serviles, ces deux grands vices qui ont néanmoins un bon côté, celui de prouver une nécessité ou une caractéristique essentielle de la nature humaine : vivre en société. Ce qui implique, il est vrai, un entraînement mutuel mais qui n’est pas nécessairement grégarité. Il doit plutôt être émulation. A l’opposé de la précédente, celle-ci est le fait d’une minorité brillant par son excellence et entraînant par là la masse vers le haut. Telle est l'Église avec ses saints (dont font partie les Mages) ! Telle est toute société à proprement parler aristocratique, c'est-à-dire gouvernée précisément par le principe d’excellence, qu’on soit en monarchie ou en république , avec une vraie légion d’honneur dont les membres sont dignes d’être honorés c.à.d. irréprochables sous tout rapport. 


A l’inverse, nous pâtissons tous, de nos jours, de l’épouvantable médiocrité ambiante et dominante, devenue très proche de la nullité, en vertu, et même moins que zéro avec tous les encouragements, médiatisés puis légalisés sans aucune vergogne, à tout ce qui est contre-nature! On ne voit pas quelle autre fin que celle des moutons de Panurge peut connaître une telle société qui, non contente d’être devenue d’une bêtise abyssale , accumule les pires crimes qui crient vengeance au Ciel ! Dieu, s’il est encore possible, daigne nous en préserver et commencer par susciter un vrai sursaut salvateur dans l’Eglise ! Tel doit être le vœu le plus cher et primordial d’un chacun un tant soit peu lucide car il y a plus qu’urgence pour les saluts individuel et commun!

mercredi 17 octobre 2018

La faiblesse humaine de l’Eglise et sa divinité

Les ennemis de l’Eglise, soutenus par la cinquième colonne de ses imbéciles utiles, font leurs choux gras dans les media de découvertes sordides sur les mœurs d’une poignée de ses ministres. Face à l’ampleur relative de ces désordres il est fort probable qu’ils aient profité, d’abord, de l’incroyable laxisme qui y règne depuis belle lurette, notamment au niveau du recrutement dans les séminaires ; puis de la complicité des loups déjà introduits dans la bergerie ; le tout pouvant être le fait de ces ennemis, comme, fait avéré, les agents communistes infiltrés dans sa hiérarchie, sans parler des francs-maçons. Mais à qui nuisent-ils ? Aux plus fragiles ou aux moins convaincus de ses membres, sans doute relativement nombreux de nos jours ? Malheureusement oui ! A l’Eglise elle-même ? Certainement pas !
     
Comme l’on dit, elle en a vu d’autres depuis 2000 ans ! Plus de deux millénaires, en effet, que les suppôts de Satan s’efforcent par tous les moyens de faire disparaître le catholicisme : en vain ! Puisque même le martyre n’y a rien fait : « sang des martyrs, semence de chrétiens » ! Satan lui-même et les démons le savent très bien ou ne se font aucune illusion sur le résultat final de leurs menées. Mais ils laissent, voire poussent, leurs conquêtes humaines, bien moins instruites et lucides qu’eux, à se déchaîner, quitte à s’y casser les dents génération après génération, afin de seulement et misérablement assouvir leur haine inextinguible de Dieu et de tout ce qui est à lui et de lui.
     
Et tout cela n’arrive, bien sûr, qu’avec sa permission car Il est capable de transformer le mal en bien, comme des pierres en fils d’Abraham aussi nombreux que les étoiles du ciel et que les grains du sable. En effet, la faiblesse humaine de l’Eglise catholique ou de ses membres au cours des siècles, qu’on peut dire, à l’expérience, sans bornes, et qui, à vue humaine, aurait dû depuis bien longtemps avoir raison d’elle, à commencer par les déficiences fréquentes et grandes dans son gouvernement ordinaire, ne rend elle pas plus évidente la divinité de cette société ?
      
Tout d’abord par la pérennité sans pareille et visible de sa tête qu’est son siège à Rome avec laquelle ne peut rivaliser aucune autre société humaine, religieuse ou pas, faisant suite, en plus, à celle de la Jérusalem hébraïque puis juive d’avant le Christ. D’autant plus que ce maintien de son autorité suprême va de paire avec celui, non moins visible, de toute l’institution telle qu’elle a été fondée par le Christ, aussi bien dans l’organisation fondamentale que dans la substance de l’enseignement laissé en dépôt, ce qu’on appelle son apostolicité, c.à.d. son unité parfaite avec l’époque des Apôtres. Nonobstant la petite parenthèse, à l’échelle de la vie de l’Eglise ici-bas, que nous vivons depuis plus de 50 ans ou depuis le Concile Vatican II… Même au milieu de cette crise terrible, comme au travers de toutes les précédentes (persécutions sanglantes et hérésies sans nombre en son sein), l’Eglise romaine continue au moins dans sa tête et dans ses membres visiblement attachés à elle ainsi qu’à son apostolicité. Car il n’est pas question, ici, de raisonner en majorités ou avec le faux esprit démocratique mais d’après le seul Evangile : « il y a beaucoup d’appelés mais peu d’élus » (Mt, 20…
     
Même si le nombre de ses membres diminue considérablement il demeure néanmoins assez important pour mettre en évidence l’autre caractéristique unique de l’Eglise qui lui valu depuis toujours son premier qualificatif, reconnu honnêtement ou nécessairement par ses adversaires, à savoir sa catholicité, son universalité également visible, aujourd’hui comme hier, ou le maintien au moins de noyaux de membres authentiques sous toutes les latitudes et longitudes. Elle est, à présent, d’autant plus remarquable et inexplicable (humainement…) que partout se font sentir les effets d’une conspiration puissante et souvent tyrannique contre sa doctrine ou sa morale, voire contre sa présence (pays totalitaires communistes, musulmans etc.). Et cela encore d’autant plus que, parmi ses vrais fidèles, elle est accompagnée d’une unité de pensée (de foi) et d’action (obéissance dans la ligne de la foi) qui, au simple regard humain, étonne et émerveille car, aujourd’hui comme hier, elle aurait pu ou dû depuis très longtemps voler en éclats en raison de cette dispersion et face à l’importance et à la malignité de l’adversité.
      
Avec tout cela va encore de paire un autre caractère distinctif de l’Eglise dont l’affirmation pourrait paraître déplacée au regard des faits infiniment déplorables rappelés au début : sa sainteté également visible… Oui ! nous l’affirmons sans peur car, là encore, il n’est pas question du nombre de ses membres saints. S’il ne se trouvait, à toute époque, qu’un seul catholique brillant parmi tous par l’éclat d’une sainteté transcendante et de loin sans pareille, cela suffirait à dire l’Eglise sainte, c.à.d. ayant la capacité unique à rendre tel, d’abord, par sa doctrine et l’exemple de son divin fondateur ; ensuite par tous les moyens spéciaux et surnaturels, institués par le Christ, de produire la sainteté dans toute âme de bonne volonté que sont, en gros, ses sacrements. Or, même actuellement, dans son dramatique état interne de déliquescence, l’Eglise, par la bouche de l’ensemble, sinon de la totalité, de ses pasteurs, en commençant par le pape, continue à défendre la morale exigeante qui la singularise, notamment dans son rejet total, clair et ferme de l’avortement, du « mariage pour tous », des P-M-A et G-P-A, de l’euthanasie etc., à l’encontre de toutes les autres institutions dominantes, religieuses et civiles, sur cette terre. Et grâce à cela et malgré cela il se trouve partout des membres de cette Eglise, à côté de ses autres membres, certes, infidèles et indignes, pour vivre conformément à ces exigences (avec l’aide nécessaire des sacrements), ce qui, ne serait ce qu’en raison de leur minorité, est un début de l’héroïcité que l’Eglise elle-même exige, à un niveau sublime, pour déclarer « saint » ou « canoniser » l’un de ses membres. Honneur décerné, de fait, qu’à un tout petit nombre.
   
Or comment expliquer la présence simultanée, constante et visible de ces quatre propriétés (apostolicité, catholicité, unité et sainteté) exceptionnelles, chacune étant pourtant si difficile, voire impossible, à réaliser dans les temps et espace si vastes que la durée de ce monde et l’étendue de cette terre, sinon par une assistance spéciale, une force surhumaine ou miraculeuse qui ne peut venir que de Dieu (le Saint Esprit envoyé par Jésus à la Pentecôte) pour faciliter, à tout moment de l’histoire, aux esprits droits la reconnaissance de l’unique Eglise fondée par lui en vue de conduire de la façon la plus sûre les âmes au salut éternel jusqu’à la fin des temps ? Pour cette raison, en plus de son divin fondateur, on peut alors la qualifier de divine. Plaise à Dieu que nous ne soyons pas de ceux qui « regardent sans regarder et écoutent sans écouter et sans comprendre » (Mt, 13)!
     
Y. Bertrand

samedi 21 juillet 2018

L’équipe de France et la Fraternité

La victoire retentissante au niveau mondial, que notre pays vient de célébrer comme il convient, a été avant tout celle d’une équipe (remplaçants et encadrement compris) et non de la somme de talents individuels (réels et aussi indispensables). Tel est le message qu’entraîneur et joueurs n’ont de cesse de faire passer et dont la vérité est mise en évidence par le documentaire et reportage sur la vie interne du groupe, pendant la préparation prochaine et le déroulement de la compétition, qui a été diffusé juste après. Le parfait esprit de camaraderie qu’il révèle en même temps que la non moins parfaite unité par rapport à l’autorité sont aussi émouvants à découvrir que le triomphe qui s’en est suivi.

Dans le milieu catholique traditionnel où il est de bon ton de balayer d’un revers de main méprisant les évènements mondains, non sans, assez souvent, quelques bonnes raisons, on serait bien inspiré de méditer cet exemple de belle réussite, certes que mondaine, comme le Nouveau Testament nous y invite, parfois, par manière de parabole (les coureurs du stade, l’intendant malhonnête, par ex.). Oui, tout spécialement à l’aube d’un nouveau et relativement long règne à la tête de la Fraternité St Pie X, on ne peut s’empêcher de penser aux divisions graves qui ont marqué et gâché le règne précédent, en honorant fort mal son beau nom (« Fraternité »), et qu’il ne faudrait, d’ailleurs, pas croire trop vite totalement disparues ou non encore latentes.

Sans doute est-il beaucoup plus difficile d’établir un parfait esprit d’équipe dans un tel groupe de près d’un millier de membres (sans compter bien sûr les fidèles par dizaines de milliers) dispersés sur la terre entière qu’au sein d’une cinquantaine de personnes vivant en un petit vase clos et motivées par de très séduisantes récompenses terrestres à court terme. Naturellement parlant il est évident que c’est même impossible ! Mais n’est-on pas censé vivre là au niveau surtout surnaturel, c.-à-d. de la foi, de l’espérance et de la charité qui rendent cela tout à fait possible et normalement encore plus parfait comme à l’échelle de l’Eglise tout entière ? On peut donc parler d’un certain échec de cette Fraternité non seulement en interne mais aussi en externe car comment son influence n’en pâtirait elle pas sur les âmes, en général, et sur les esprits romains, en particulier, qu’elle veut tous ramener à la pure Tradition de l’Eglise ? Les derniers, fins politiques, ont beau jeu, alors, d’exploiter cette faiblesse pour leurs desseins pas nécessairement très catholiques…

Qu’est ce que le véritable et parfait esprit d’équipe ou de fraternité ? C’est, tout d’abord et au moins, le règne d’une bienveillance sincère, et non de façade, entre tous les membres. C’est aussi celui d’une véritable confiance mutuelle qui donne à chacun l’assurance de la solidarité inconditionnelle. Ce sont surtout le respect et la confiance non moins réels envers l’autorité laquelle, en retour, assure, alors mais dans ce cas seulement, la parfaite unité d’action du groupe avec une efficacité maximale.

A cela s’oppose tout le mal causé au prochain, en général, et à l’autorité, en particulier, par la langue ou la plume: persifflage et mauvais esprit qui entraînent forcément désobéissance ou refus de coopérer à l’œuvre commune du groupe pour lui préférer ses petites vues et fins « perso ». A ce sujet nul ne peut ignorer les graves avertissements de St Jacques et, à sa suite, de tous les maîtres spirituels dont celui-ci stigmatisant le bavard : « toute sa vie de fond passe sur ses lèvres et s’écoule dans les flots de paroles qui emportent les fruits de plus en plus pauvres de sa pensée et de son âme. Car le bavard n’a plus le temps et bientôt plus le goût de se recueillir, de penser ni de vivre profondément. Par l’agitation qu’il crée autour de lui il empêche chez d’autres le travail et le recueillement féconds. Superficiel et vain le bavard est un être dangereux » (R.P M.-Eugène de l’E.-J., o.c.d.) ! « Dangereux » car c’est de cette perte de la charité que découle sans doute, entre autres, l’esprit de parti ou d’a priori défavorable par lequel on n’accorde sa confiance qu’aux uns et pas aux autres en excluant, de fait mais sans aucun droit, ces derniers du groupe.

Sans doute le charisme naturel du chef joue-t-il dans l’unité également naturelle d’un groupe mais il n’est pas nécessaire au niveau surnaturel où nous nous situons et où c’est l’action de la grâce ou du St Esprit qui est primordiale. Donc son absence ne peut en aucune façon excuser la rébellion.

Comme l’équipe de France de balle au pied, et bien plus encore, la Fraternité St Pie X est engagée dans une compétition de niveau mondial dont l’objectif est la contribution au salut éternel du plus grand nombre d’âmes. D’abord, certes, par les moyens surnaturels mais sans mépriser les naturels dont Dieu est aussi l’auteur. Comme celui-ci consacré par l’adage : « on n’attire pas les mouches avec du vinaigre ». Comment, en effet, provoquer l’enthousiasme pour la Tradition, que l’on incarne, sans afficher comme nos actuels champions du monde de parfaites entente et unité ? Car de là découlent le grand bonheur du « vivre ensemble » puis le succès quasiment assuré ; donc la joie intense, communicative et contagieuse…

mardi 19 juin 2018

La santé de l'Eglise et de la Fraternité Saint-Pie X

C’est une évidence que, depuis des décennies, le corps de l’Eglise, dans sa composante humaine ou faillible, est malade et même très gravement malade. Car, comme un corps physique qui l’est également, il ne parvient plus à se défendre contre ce qui porte atteinte à son intégrité. Son système immunitaire est défaillant. La preuve de sa santé est, en effet, sa capacité à réagir comme il faut aux attaques contre son bien commun fondamental qu’est la foi, soit en elle-même, soit en ce qui lui est connexe dans la doctrine ou dans la discipline.
     
Cela se constate, tout d’abord, dans la sa manière de tenir ses conciles convoqués justement pour définir, dans la concertation la plus large et sereine possible de l’ensemble de ses principaux chefs et sages et l’invocation spéciale du St Esprit (charisme d’infaillibilité), les moyens adéquats de remédier aux maux les plus graves d’une époque. Trois exemples suffisent à l’illustrer. Le tout premier concile, qui a réuni les Apôtres, a ainsi résolu la question, disputée entre les judéo-chrétiens et St Paul, des prescriptions mosaïques pour les nouveaux chrétiens issus du paganisme. Le concile de Trente (XVIème) fut réuni pour réfuter les erreurs protestantes et réformer en profondeur la discipline de l’Eglise, notamment pour la formation des prêtres, et lui procurer ainsi comme un nouveau départ qui se solda notamment, en quatre siècles, par des gains considérables en pays de mission, à commencer dans le Nouveau Monde. Le concile Vatican II l’illustre aussi mais malheureusement comme contre-exemple. On pouvait s’attendre, en effet, à ce qu’au moins il s’occupe à réfuter aussi, de façon plus radicale et solennelle, les principales erreurs graves (qui divisent alors que la vérité unit) circulant dans l’Eglise depuis les cent dernières années (libéralisme, modernisme etc.) bien que déjà vigoureusement condamnées par les papes, notamment par St Pie X et Pie XII, mais manifestement sans en être éradiquées. Il n’en fut rien puisque ce fut tout le contraire qui arriva, à savoir le triomphe officiel et incroyable, dans et par le concile lui-même, de ces erreurs dont le pendant (et le châtiment) fut la peau de chagrin à laquelle devint vite réduite l’Eglise!
     
Un autre constat de la santé ou non de l’Eglise est dans l’attitude de son chef suprême. Nous venons de citer St Pie X qui en est l’un des plus beaux exemples et encore proche de nous ; et auquel on doit, en majeure partie, l’œuvre magnifique accomplie partout par l’Eglise jusqu’à Pie XII inclus. Car, à lui tout seul, il a réalisé une œuvre comparable à celle du grand Concile de Trente, à la fois dans la réfutation des graves erreurs contemporaines et dans les réformes disciplinaires à mettre en œuvre afin d’y remédier en profondeur. Le « bon pape Jean » en est aussi une illustration mais malheureusement a contrario : par son optimisme béat, volontariste, sorte de positivisme moral, à ne voir que les bons côtés ou petites parcelles de vérité dans le monde présent ou dans les autres religions alors que leurs erreurs et égarements graves y crèvent les yeux ! D’où son refus de les condamner, par une conception faussée de la charité, soit en tant que pape, soit dans le concile convoqué par lui. Certes, selon St Paul, la charité « se réjouit de la vérité, ne tient pas compte du mal, excuse tout ou supporte tout » (I Cor, 13) ; mais, aussi selon le même, elle « proclame la Parole, insiste à temps et à contretemps, reprends, menace, exhorte etc. » (II Tim, 4). Et on ne connait que trop la suite, toujours plus catastrophique, jusqu’à aujourd’hui…
     
La facilité de diffusion du mal dans un corps est encore une preuve de son manque de santé. L’Eglise est déjà passée par un tel état dans son histoire : lors de la crise arienne (IVème) où, comme il a été dit, un matin, le monde se réveilla arien ! En effet, la plupart des évêques, ainsi que l’empereur romain, devinrent ariens ou semi-ariens. Même un pape de cette époque, Libère, semble avoir eu quelque faiblesse. Ce qui explique que le grand héraut et héros de la foi d’alors, St Athanase, fusse tant persécuté et plusieurs fois chassé de son siège épiscopal. La situation fut analogue, lors de la crise protestante, dans l’Europe, alors, toute catholique, où près de la moitié bascula totalement, clergés, princes et fidèles, dans l’hérésie et où les catholiques demeurés fidèles furent violemment persécutés. N’a-t-on pas connu la même chose au XXème à l’occasion du concile Vatican II où un semblable vent de folie, et non le St Esprit, semble avoir encore soufflé dans l’Eglise et entraîné la quasi totalité des évêques à signer des textes, approuvés ensuite par le pape, totalement novateurs et formellement opposés à sa Tradition bimillénaire?
     
Toute proportion gardée, ce qui vaut pour l’ensemble de l’Eglise vaut aussi pour chacune de ses parties. A la veille d’un nouveau chapitre électif pour la Fraternité St-Pie X, moment majeur de sa vie ou pour son avenir, il n’est pas inutile de se le rappeler. Il est, en effet, un peu comme un concile à l’échelle de cette congrégation. Il se présente a priori bien car, à la différence du corps global de l’Eglise, elle paraît un corps sain. Car sa raison d’être fut la réaction claire et ferme aux graves erreurs contemporaines dans l’Eglise, à l’instar des papes d’avant Vatican II déjà nommés. Et cette attitude doctrinale, sans le moindre compromis, n’a pas changé d’un iota depuis sa fondation, est demeurée dans la droite ligne de celle de son célèbre fondateur, Mgr Marcel Lefebvre.
     
Ce qui pour autant ne signifie pas que tout y aille bien. Il n’a certainement pas échappé aux observateurs des événements publics de sa vie interne qu’elle a même un talon d’Achille : s’il n’est assurément pas doctrinal, il est, en revanche, disciplinaire (application juste de la doctrine), à commencer par la difficulté de son positionnement à l’égard de Rome, inhérente à son état de résistance (légitime). Cette question a posé problème depuis son origine, a causé des troubles et même des scissions récurrents : avec principalement les « sedevacantistes » (années 70 et 80), les « ralliés » (fin années 80 et suivantes) et récemment les « résistants », opposés à toute régularisation de la situation canonique par la Rome actuelle, considérée comme se jeter dans la gueule du loup. Sa ligne de conduite a toujours été de ne rien refuser de celle-ci tant que cela ne compromet pas l’intégrité de la foi et de la morale (danger estimé réel en 1988), ce qui n’est rien d’autre que le pur esprit de l’obéissance due envers toute autorité reconnue comme légitime ; et ce qui est logique, de sa part, puisqu’elle a toujours reconnu comme telle tous les derniers papes en rejetant le sedevacantisme. Là aussi elle semble demeurée saine par sa fermeté à reprendre, menacer, voire exclure, ses propres membres s’opposant publiquement à ses décisions sur cette question.
     
Gageons (et prions fort) qu’elle continue à l’être durant son chapitre tout proche, préservé de tout vent de folie, et dans la personne de son futur supérieur général! 

dimanche 4 mars 2018

« Les animaux malades de la peste » [1] au XXIème siècle

« Un mal qui répand la terreur,
Mal que le Ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La Peste [puisqu'il faut l'appeler par son nom]
Capable d'enrichir en un jour l'Achéron,
Faisait aux animaux la guerre.
Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés. »
Une nouvelle peste est décrite dans un dossier complet paru dans Valeurs Actuelles de décembre dernier. Dossier courageux car ose briser le tabou consensuel et habituel sur le sujet abordé. Il honore donc cette revue.

Le mal mortel, qui y est décrit, est avant tout moral : la pornographie! 
  
L’Achéron, fleuve des enfers de la mythologie grecque, équivaut donc à l’Enfer des chrétiens ou de ceux qui y croient encore et auxquels il inspire, à juste titre, la plus grande mais salutaire terreur [2].

Que Dieu abandonne à ce point les hommes d’aujourd’hui à ce vice peut être considéré comme un châtiment et l’un des pires puisque pas seulement les corps sont frappés, comme par la peste, mais surtout les âmes, mettant en grand danger leur salut éternel. 

Qu’il y ait de nos jours des crimes à punir et qui crient même vengeance au Ciel, est une évidence : l’avortement, le « mariage pour tous » et les autres négations de la loi naturelle auxquelles il faut malheureusement ajouter celles de la loi surnaturelle, notamment avec la nouvelle pastorale papale en faveur des divorcés remariés (illégitimement)…

« Tous étaient frappés » : « à l’école, sur internet, dans les familles… », sous-titre notre hebdomadaire pourtant pas toujours foudre de guerre!
« On n'en voyait point d'occupés
A chercher le soutien d'une mourante vie ;
Nul mets n'excitait leur envie ;
Ni Loups ni Renards n'épiaient
La douce et l'innocente proie.
Les Tourterelles se fuyaient.
Plus d'amour, partant plus de joie. »
D’où vient cette perte de goût des choses ordinaires de la vie ? C’est le propre d’une addiction que de dévorer ainsi énergie et temps. Comment se contracte-t-elle ? Par ignorance, voire par mépris, des recommandations des bons auteurs spirituels [3], unanimes à dire que l’inclination naturelle à la luxure, séquelle universelle [4] du péché originel, est si forte que la seule parade efficace est autant que possible la fuite des occasions dangereuses (avec la prière concomitante). Toute présomption en la matière se paie cash et cher (à tout point de vue) !
« Le Lion tint conseil, et dit : Mes chers amis,
Je crois que le Ciel a permis
Pour nos péchés cette infortune ;
Que le plus coupable de nous
Se sacrifie aux traits du céleste courroux,
Peut-être il obtiendra la guérison commune.
L'histoire nous apprend qu'en de tels accidents
On fait de pareils dévouements :
Ne nous flattons donc point ; voyons sans indulgence
L'état de notre conscience.
Pour moi, satisfaisant mes appétits gloutons
J'ai dévoré force moutons.
Que m'avaient-ils fait ? Nulle offense :
Même il m'est arrivé quelquefois de manger
Le Berger.
Je me dévouerai donc, s'il le faut ; mais je pense
Qu'il est bon que chacun s'accuse ainsi que moi :
Car on doit souhaiter selon toute justice
Que le plus coupable périsse. »
Telles devraient être les paroles de sagesse de tout clerc et même de tout gouvernant dignes de ce nom, devant normalement rechercher le bien véritable de leurs sujets ! Il n’en est pour ainsi dire rien. Au contraire :
« Sire, dit le Renard, vous êtes trop bon Roi ;
Vos scrupules font voir trop de délicatesse ;
Et bien, manger moutons, canaille, sotte espèce,
Est-ce un péché ? Non, non. Vous leur fîtes Seigneur
En les croquant beaucoup d'honneur.
Et quant au Berger l'on peut dire
Qu'il était digne de tous maux,
Etant de ces gens-là qui sur les animaux
Se font un chimérique empire.
Ainsi dit le Renard, et flatteurs d'applaudir.
On n'osa trop approfondir
Du Tigre, ni de l'Ours, ni des autres puissances,
Les moins pardonnables offenses.
Tous les gens querelleurs, jusqu'aux simples mâtins,
Au dire de chacun, étaient de petits saints. »
Est bien vrai le proverbe : « nul ne peut être (bon) juge (déjà de soi même) et partie » !... Ainsi que l’adage : « à force de ne pas agir comme on pense, on finit par penser comme on agit » ! Perversion volontaire des consciences qui a fait les pires hypocrites, les pharisiens d’hier et les libéraux ou libertaires d’aujourd’hui, se permettant tout mais accablant et persécutant ceux qui, au nom de la morale, savent s’interdire non, certes, sans faiblesses:
« L'Ane vint à son tour et dit : J'ai souvenance
Qu'en un pré de Moines passant,
La faim, l'occasion, l'herbe tendre, et je pense
Quelque diable aussi me poussant,
Je tondis de ce pré la largeur de ma langue.
Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net.
A ces mots on cria haro sur le baudet.
Un Loup quelque peu clerc prouva par sa harangue
Qu'il fallait dévouer ce maudit animal,
Ce pelé, ce galeux, d'où venait tout leur mal.
Sa peccadille fut jugée un cas pendable.
Manger l'herbe d'autrui ! quel crime abominable !
Rien que la mort n'était capable
D'expier son forfait : on le lui fit bien voir.
Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. »
A l’époque du fameux fabuliste ou dans le doux royaume de France d’alors, tout « honnête homme » un tant soit peu instruit ou toute « tête bien faîte » était profondément imprégnée de bonne doctrine et avait la foi catholique, même si non exemplaire en tout point. On savait donc qu’en tout temps Dieu exigea des victimes expiatoires et des boucs émissaires. Et parmi les plus innocents comme l’agneau pascal. Car, s’Il est infiniment miséricordieux ou toujours prêt à pardonner, ce n’est pas sans exiger une réparation, à commencer par le repentir sincère du cœur. L’âne en est une belle figure et Jésus-Christ en est la plus parfaite réalisation [5], condamné de la façon la plus inique par ceux que l’on sait. Mais en réalité condamné à notre place par Dieu afin de mériter, grâce à son innocence parfaite, et d’appliquer le pardon de leurs crimes aux hommes malgré tout de bonne volonté. Puissent ils être nombreux par les temps si corrompus qui courent! 

Puissent ELLES aussi être nombreuses ! Car, s’il est vrai que la corruption dont nous parlons fut longtemps l’apanage du premier sexe, en qui « la concupiscence est plus grande » [6], les enquêtes récentes montrent qu’il n’en est plus rien. Le vrai visage d’un certain féminisme est ainsi découvert : l’envie, autre grand vice, est sa motivation ! Mais l’envie la plus basse, de ce qu’il y a de pire comme le libertinage. D’où toutes les « avancées » pour « libérer » la femme de la maternité (contraception, avortement), son travail naturel, et encourager le travail hors du foyer familial qui le favorise. Belle avancée, merveilleux progrès sera ce que d’avoir bientôt non seulement des Mmes Putiphar [7] mais aussi des violeuses en série et des « Barbes Bleues » [8] !!

Quand Notre Dame dit que ce vice est celui qui entraîne le plus d’âmes en Enfer [9], les faits semblent malheureusement le confirmer. Bon Carême !


  1. de Jean de La Fontaine (1621-1695), Les fables - Recueil II, livre VII 
  2. un seul péché mortel non regretté et non confessé suffit à y faire tomber pour l’éternité /3/ 
  3. fidèles à l’Evangile : « si ton œil est pour toi un sujet de scandale (…) jette le loin de toi etc. » (Mathieu, 17)
  4. comme tous les péchés capitaux au nombre de sept 
  5. ce que doit aussi être tout vrai chrétien en union avec J.C. : selon les capacités de chacun
  6. St Jean Chrysostome, homélie 34 sur la Ière Epître aux Corinthiens
  7. la femme de l’eunuque du pharaon qui chercha à séduire le patriarche Joseph (Genèse, 39) 
  8. comment ne pas voir un rapport de cause à effet entre ce qu’offre notamment internet (en pornographie et en violence extrême) et la multiplication effrayante des crimes les plus crapuleux, horribles, lâches et abjects ?! 
  9. même s’ils sont en soi moins graves que les péchés de l’esprit

vendredi 7 juillet 2017

La reconnaissance de la Fraternité St-Pie X (F.S.S.P.X) et le volontarisme

Là où il y a des hommes il y a de l’hommerie ! Et le monde ecclésiastique n’échappe pas à cette loi. L’histoire de l’Eglise le prouve abondamment à chacune de ses pages.

Certains s’en scandalisent, surtout à notre époque où l’on a perdu la juste vision de l’homme dans sa partie la plus noble, l’âme, dont l’existence elle-même est niée par beaucoup, au nom d’un matérialisme philosophique pur et dur. On ne croit ainsi plus au péché originel dont, jusqu’à preuve du contraire, les clercs ne sont pas plus préservés que les autres. On a donc jeté aux oubliettes tout ce que la théologie et le catéchisme enseignaient jadis sur cette question capitale. Notamment quant à ses séquelles que l’on garde plus ou moins à vie, malgré la purification et la grâce baptismales, et qui font que même les plus grands saints ne peuvent s’empêcher de façon absolument parfaite de tomber dans quelques péchés, certes très légers mais péchés quand même.

Il y eut ainsi entre eux des controverses, voire des querelles qui demeurent comme des morceaux d’anthologie dans l’histoire de la pauvre humanité : entre St Pierre et St Paul, entre St Jérôme et St Augustin, entre St Thomas d’Aquin et St Bonaventure etc.. Alors comment n’y en aurait il pas, avec son lot de déchaînement des passions, entre ceux qui sont moins ou bien moins saints et qui constituent l’écrasante majorité des hommes quels qu’ils soient?

En ces aléas de l’existence présente, impossibles à éviter tout à fait, le monde ecclésiastique a le secret des noms d’oiseaux dans un mode ou une apparence tellement châtiés qu’ils ne sont compréhensibles que par les initiés. Que les non initiés sachent que se jeter à la figure, par exemple, « intellectualiste » ou, à l’opposé, « volontariste » font partie des plus grandes injures !... Ainsi se sont opposées pendant un bon nombre de siècles de grandes écoles de pensée philosophique et théologique comprenant chacune une cohorte de saints et de docteurs de l’Eglise, notamment celles représentées par deux des plus grandes familles religieuses de l’Eglise : les dominicains, d’un côté, et les jésuites, de l’autre.

Il suffit de connaître un peu les différences de personnalité de chacun des fondateurs de ces deux ordres, nécessairement marqués en profondeur par elles dans leurs règles, constitutions ou styles de vie religieuse, pour voir l’origine de telles invectives. Dieu donne, en effet, à chacune de ses créatures une individualité, un caractère unique et nécessairement limité de telle sorte qu’ensemble elles se complètent et constituent un tout harmonieux, image la plus complète possible de la perfection infinie de Dieu. St Dominique était plutôt un contemplatif donc ainsi fut son ordre, notamment dans sa plus belle figure qu’est St Thomas d’Aquin. St Ignace, ancien capitaine, était à l’évidence plutôt un homme d’action donc ainsi fut sa fameuse Compagnie de Jésus dans laquelle les œuvres apostoliques ou missionnaires furent nettement plus développées que chez les fils de St Dominique. Mais il ne faut pas tomber dans les schémas réducteurs et simplistes car St Dominique et beaucoup de ses fils furent aussi de grands apôtres et missionnaires (auprès des Cathares pour le premier). A l’inverse, les fameux Exercices spirituels de St Ignace montrent que lui et nombre de ses fils furent de grands contemplatifs et hommes d’oraison ainsi que de grands théologiens. Il n’empêche que pris dans leur globalité chez les premiers l’accent est mis sur la contemplation pure, alors que chez les seconds l’accent est mis sur l’activité apostolique.

D’où une différence d’accentuation aussi dans la vie intellectuelle et spéculative, en réalité comparable dans son importance chez ces deux familles spirituelles. Dans la 1ère, l’accent est mis sur l’étude spéculative à son plus haut niveau, cad portant sur Dieu en lui-même et dans son œuvre qu’est la création, que ce soit au niveau de la seule raison (théodicée et métaphysique), que ce soit au niveau de la foi (théologie dogmatique). Dans la seconde, l’accent est mis sur l’étude de l’homme dans ses actes en vue de sa fin dernière (psychologie, éthique, théologie morale et ascétique). Ce qui constitue une merveilleuse complémentarité et une grande richesse pour l’ensemble de l’Eglise.

Mais deux défauts ou tendances ont pu en naître chez certains de leurs représentants. D’un côté, celle à oublier que la fin ultime n’est pas dans la contemplation elle-même ou dans la seule activité intellectuelle mais dans l’union de charité à Dieu qui se réalise le plus dans la vie apostolique et réside dans la volonté (comme en Dieu : « Dieu est Amour » ; et comme chez les saints : l’héroïcité des vertus). De l’autre côté, celle à oublier que pour que cette union soit la plus parfaite possible la volonté doit nécessairement être suffisamment éclairée et guidée par les plus hautes étude ou contemplation possibles de Dieu dès ici bas (l’intellect n’est pas supérieur mais antérieur, par nature, à la volonté).

Mais, de nos jours, cette opposition n’existe malheureusement plus entre ces deux ordres également atteints par les ravages des nouvelles philosophie et théologie dans la pensée ; et ceux de l’œcuménisme dans l’esprit apostolique ou missionnaire. Elle existe, par contre, entre, d’un côté, la pensée moderne et le modernisme ; et, de l’autre, la pensée de l’Eglise éternelle qui se récapitule en celle de St Thomas d’Aquin. La première reproche à la seconde son intellectualisme au nom de son agnosticisme, son erreur fondamentale qui interdit tout discours raisonné sur Dieu dont elle refuse même d’affirmer la simple existence et a fortiori sa Révélation. Et la seconde reproche inversement à la première son volontarisme, à l’image des « impératifs catégoriques » de Kant ou de la soi disant éthique moderne et évolutive, car non ancrée dans la reconnaissance et connaissance des lois divines et immuables, naturelle et surnaturelle, mais dans les seuls a priori ou diktats de la volonté humaine, individuelle et collective.

Cette opposition existerait, par contre, chez les tenants de la fidélité intégrale à St Thomas et à la Tradition de l’Eglise. « Volontariste » est, en effet, l’injure suprême, dans la bouche de ceux qui se considèrent donc « intellectualistes » (sinon se complaisent dans leur intellect), à l’adresse de certains de leurs semblables. Tel est le cas dans la querelle interne à F.S.S.P.X avec la perspective de sa reconnaissance entière par la volonté presque exclusive de Rome et qui doit se traduire par l’octroi d’un statut très spécial et presque unique dans l’Eglise : celui de prélature personnelle, certes préféré par la Fraternité, car doit la protéger le mieux possible de l’ingérence des évêques diocésains, toujours modernistes pour la plupart, étant entendu qu’il est impossible de ne pas avoir certaines relations de dépendance par rapport aux autorités légitimes de l’Eglise, principalement romaines mais même épiscopales. Ce serait donc volontarisme ou seulement « impératif catégorique » que d’accepter cela seulement parce que cela vient de la Rome encore conciliaire et car « il ne faut jamais sous estimer son adversaire ». Comme si le successeur de Pierre ne devait être vu que comme n’importe quel adversaire et non d’abord comme la pierre sur laquelle s’édifie nécessairement toute œuvre d’Eglise ou hors de laquelle on ne construit que sur le sable ! Comme si ce n’était pas un impératif de foi et de salut éternel que de ne pas refuser tout lien de dépendance concrète par rapport au fondement divin de l’Eglise qu’est le successeur actuel de Pierre, quelle que soit sa valeur personnelle ! N’est ce pas de façon bien plus patente volontarisme que d’agir ou de réagir non par prudence mais par crainte en ne se fondant que sur des conjectures, sans lumières ou preuves suffisantes, ou que sur des procès d’intention soit par rapport à Rome, soit par rapport à Mgr Lefebvre qu’on tente de récupérer en prétendant que, comme en 1988, il n’aurait jamais accepté cette nouvelle proposition, comme si la situation présente était identique à celle de son temps ! A moins qu’ils aient la science infuse ou le don de prophétie ? Ce qu’à Dieu plaise ! Mais, en attendant que cela soit dûment prouvé, gardons raison !

B.Y.

mercredi 26 avril 2017

Les mariages et le mariage de la Fraternité Saint-Pie X (F.S.S.P.X)

Malgré l’infime portion de l’univers médiatique qui a parlé de cela, surtout au beau milieu de la campagne présidentielle, il n’a sans doute pas échappé à bon nombre de « tradis » branchés, de tous bords, que le Vatican vient de commettre un nouvel acte en direction de la F.S.S.P.X [1] en incitant les évêques à accorder à ses prêtres, en général, la délégation ordinaire de l’Eglise pour célébrer les mariages, de futurs préparés par leurs soins, dans les églises diocésaines, après leur avoir concédé, depuis 2015, le pouvoir ordinaire d’entendre la confession de tout fidèle s’adressant à eux, notamment dans leurs chapelles.

On remarquera que, dans l’un et l’autre cas, c’est implicitement reconnaître la bonne doctrine de ces prêtres, ce qui est plutôt rassurant après le trouble grave provoqué notamment par le synode sur les divorcés remariés ; que vouloir retirer toute crainte sur la validité aux fidèles, attachés à la doctrine traditionnelle mais non spécialistes en droit canonique, est conforme à l’esprit de charité dont doit spécialement briller l’Eglise ; le tout prouvant que le Saint Esprit continue encore et malgré tout à l’assister dans son état pourtant dramatique. 

On remarquera également que la première concession n’est pas faite via les évêques alors que seconde l’est, sans doute en raison de la bien plus grande importance de la confession pour le salut; et qu’il n’est pas parlé des mariages célébrés par ces mêmes prêtres dans leurs propres chapelles, que ce soit dans le passé comme dans le présent et le futur, sans doute tant que la F.S.S.P.X n’a pas de statut propre et pleinement reconnu par Rome. 

Pour cette raison il apparaît clair que ces actes romains, surtout le plus récent, sont unilatéraux et non le fruit d’un accord, sur ces points précis, car la F.S.S.P.X aurait certainement préféré ne pas exposer ses prêtres et, plus encore, ses fidèles au dilemme du mariage soit, désormais, en vertu de cette dernière mesure, comme si tout était redevenu normal dans l’Eglise ; soit, encore, en vertu de la délégation extraordinaire concédée par son droit [2] dans les situations exceptionnelles ou l’état de nécessité puisque, à ses yeux, il est toujours réalité au niveau de la foi et de la morale (surtout sur le mariage) à défendre, comme le commentaire « autorisé » de la F.S.S.P.X sur ce document [3] le répète à l’envi. 

Faut-il pour autant mépriser, une nouvelle fois, une telle mesure objectivement bienveillante envers la F.S.S.P.X, même si fâcheusement incomplète, comme en ont pris l’habitude, dans ses rangs, une frange non d’intransigeants [4] mais de « purs et durs », quelque peu paranoïaques, qui ne veulent y voir que des tentatives de réduire sa résistance, en y semant la zizanie [5], et ont ainsi vite fait d’accuser de trahison leurs confrères, voire supérieurs, qui ne partagent pas leur dogmatisme pratique et primaire ? Force est, en effet, de constater que telle n’est pas la position officielle de la F.S.S.P.X, qui fait aussi et seulement preuve de bienveillance envers Rome, en la remerciant courtoisement de cette concession ; mais sans se battre la coulpe le moins du monde de s’en être passée jusqu’à présent et en disant vouloir prendre le temps d’étudier les conditions de sa mise en œuvre pour le plus grand bien de ses fidèles.

Au travers de cette prévisible et nouvelle contestation interne, se manifeste une autre difficulté que la régularisation des mariages de la F.S.S.P.X, celle de la normalisation de son propre mariage avec Rome ! Pour mémoire, ce qu’on pourrait appeler ses fiançailles avec celle-ci eurent lieu par son approbation officielle et, entre autres, romaine lors de ses fondation et période probatoire dans les premières années 1970 qui auraient dû aboutir à sa reconnaissance définitive en 1975. Mais, dès 1974, il y eut rupture unilatérale, du côté du Vatican [6] pour aboutir aux fameux événements de 1988. Les relations ont repris de façon positive depuis l’an 2000 mais tardent à aboutir.

Les raisons en sont sans doute bien humaines autant que doctrinales. Il y a, du côté d’encore beaucoup d’évêques et de cardinaux, de la résistance qui est, parfois, une sorte de tyrannie ou de sectarisme venant de ce qu’ils ont objectivement trahi la première raison d’être de la hiérarchie qu’est le salut des âmes par la défense avant tout de la saine doctrine. De l’autre, au sein de la F.S.S.P.X elle-même, il y a le mauvais pli pris, en bonne partie par la force des choses, d’agir en s’affranchissant de presque toute dépendance pratique et normale envers la hiérarchie. Or nul n’aime naturellement changer ses habitudes ! Il est donc humain de trouver de « bonnes » raisons de repousser indéfiniment le moment où l’on ne pourra plus savourer la satisfaction, d’un côté, de dominer par abus de pouvoir [7] et, de l’autre, de n’en faire qu’à sa guise : le tout « pour la gloire de Dieu et le salut des âmes », bien sûr… ! 

Voila pourquoi l’argument du retour de Rome à l’orthodoxie pour avoir avec elle des relations saines et bonnes n’est au fond qu’un prétexte. D’autant plus que l’histoire de l’Eglise prouve abondamment que ces basses « hommeries » ont existé à chacune de ses pages donc ne cesseront pas avec la disparition de l’état de nécessité ; qu’elles font partie des croix ordinaires de la vie en société, quelle qu’elle soit, qu’il est indigne d’un chrétien ou lâcheté de sa part de vouloir fuir à tout prix [8].

Répondre aux avances romaines, ce n’est donc, d’un côté comme de l’autre dans les circonstances présentes, avoir en vue qu’un mariage de raison et non d’amour, comme l’étaient aussi, le plus souvent, les unions matrimoniales des siècles passés... Bien que cela puisse - et doive - être aussi un bel acte de charité surnaturelle avant tout envers les âmes à sauver, voire envers les responsables actuels de l’Eglise qui, derrière une assurance de façade en persévérant dans leurs égarements, peuvent cacher une détresse profonde face à l’évidence de son état catastrophique. Cela devrait aider, dans la F.S.S.P.X, à beaucoup relativiser les différends internes, d’autant plus qu’il ressemble fort, dans le cas présent, à une résurgence de l’opposition perpétuelle entre idéalisme et réalisme donc entre un faux et un vrai thomisme [9]!
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[1] du 5 avril 2017 

[2] mais contestée, même si bien plus par nombre d’évêques, qui considèrent donc invalides de tels mariages, que par Rome elle-même 

[3] du 8 avril 2017 

[4] la juste et intrépide intransigeance, mais sans raideur ni amertume, sur les plus hauts principes de l’Eglise, l’intégralité de la foi et de la morale, a toujours été la caractéristique de la F.S.S.P.X et l’est encore. 

[5] qu’en réalité ils sèment eux-mêmes ! 

[6] mais de la part de la Rome « conciliaire » et non de la Rome « de toujours », comme disait feu Mgr Lefebvre 

[7] il n’est pas rare de constater dans l’exercice du pouvoir, notamment ecclésiastique, un autoritarisme ou une sorte de jalousie féminine qui souffre difficilement son partage, en écrasant toute concurrence supposée ou en voyant vite de la désobéissance dans les initiatives. La manière virile se manifeste, au contraire, par la capacité à déléguer (en exploitant les talents à bon escient et en laissant donc une certaine autonomie ou une part d’initiative) à l’instar de la hiérarchie d’institution divine (non sans analogie avec la militaire) par laquelle le Christ lui-même a voulu partager son propre pouvoir souverain et universel avec son vicaire, le pape ; a voulu que celui-ci le partage en chaque lieu de l’Eglise sur cette terre avec les évêques investis par lui ; puis que ceux-ci fassent de même avec leurs curés etc.. Etant entendu que celui qui a reçu délégation n’agit légitimement que tant qu’il n’en dépasse pas les limites fixées par l’autorité supérieure ; et doit suffisamment lui rendre compte. Sans parler de la vertu surnaturelle ou chrétienne d’obéissance qui fait aimer, à l’exemple encore de Jésus-Christ, la pratique de la soumission ou de la dépendance donc de l’humilité… 

[8] étant sauve la nécessaire protection des membres et des fidèles de la F.S.S.P.X, par ses propres maisons et chapelles, voulue par son fondateur ; lequel n’a néanmoins jamais voulu une séparation parfaitement hermétique ou schismatique du reste de l’Eglise; pas plus qu’on ne peut être totalement séparé de la société civile sous peine d’être privé de ses secours élémentaires et nécessaires et d’être hors la loi ! 

[9] au moins pratique sinon spéculatif